La terminologie bijuridique : Traduire les documents juridiques dans les systèmes de droit du Canada
Comprendre le bijuridisme au Canada
Lorsque je traduis des documents juridiques, l’une de mes principales considérations dans le choix de la terminologie appropriée est le système juridique en jeu et, plus précisément, la province de mon auditoire.
On ne peut pas comprendre pleinement la traduction juridique au Canada sans d’abord comprendre le bijuridisme, c’est-à-dire la coexistence de deux systèmes juridiques : le droit civil, utilisé au Québec, et la common law, appliquée dans le reste du Canada.
Pour situer le contexte, environ 10 % des pays du monde, dont le Canada, l’Écosse, l’Afrique du Sud et les Philippines, sont bijuridiques, tandis qu’environ 80 % des pays utilisent soit le droit civil, soit la common law comme système juridique principal.
Au Canada, le bijuridisme trouve son origine dans l’histoire coloniale, les influences françaises et britanniques ayant façonné un cadre juridique qui respecte les deux traditions.
Le rôle de la terminologie bijuridique dans la traduction
Il est essentiel, pour les traductrices et traducteurs travaillant dans le domaine juridique, de connaître le bijuridisme, car son champ d’influence est vaste, du choix de la terminologie à l’interprétation des concepts juridiques. Qu’il s’agisse de traduire des contrats, des testaments, des jugements ou d’autres documents juridiques, la terminologie bijuridique est particulièrement cruciale, car ces documents doivent être clairs au-delà des frontières provinciales.
Par exemple, comme les contrats lient juridiquement les signataires, qui sont souvent situés dans des compétences territoriales différentes, et peut-être soumis à des systèmes juridiques différents, le rôle de la traductrice ou du traducteur n’est pas seulement linguistique, mais aussi interprétatif, en veillant à ce que chaque clause ait la même valeur juridique au Québec qu’en Ontario. Cette approche bijuridique permet d’éviter les litiges et les malentendus qui pourraient résulter d’interprétations juridiques divergentes.
Adapter la terminologie juridique selon la juridiction
Lorsqu’ils traduisent la terminologie juridique, les traductrices et traducteurs doivent donc tenir compte non seulement de leur public cible (francophone ou anglophone), mais aussi du système juridique (droit civil ou common law). Par exemple, si nous avons un contrat à traduire en français pour une cliente ou un client de l’Ontario, nous tiendrons compte du système juridique de cette province (common law).
À l’inverse, si notre traduction est destinée à une clientèle anglophone du Québec, nous tiendrons compte de la terminologie du droit civil en anglais. Enfin, si notre public cible est situé à la fois au Québec et en Ontario, ou même au Québec et aux États-Unis, nous utiliserons soit une terminologie communément comprise par les deux parties, soit des notes explicatives pour clarifier le sens, selon le cas. Pour en savoir plus, voir Bijuridisme canadien : Méthodologie et terminologie de l’harmonisation.
Exemples de terminologie bijuridique
Saisie-Exécution
Le concept juridique de « saisie-exécution », le processus par lequel un créancier peut saisir les biens d’un débiteur pour exécuter un jugement, peut se traduire par « seizure in execution », « execution » ou « seizure and sale », en fonction de notre public. Bien que ces termes puissent sembler équivalents, les règles et les procédures relatives à leur application varient d’une province à l’autre. Les contrats doivent alors préciser les lois applicables afin de s’assurer que les procédures en vigueur dans la compétence territoriale concernée sont claires.
Fiducie
D’autres concepts de la common law tels que les « trusts » ne reflètent que très imparfaitement leur traduction en français (« fiducie »). La différence fondamentale entre les fiducies de droit civil et les trusts de la common law réside dans leurs cadres juridiques et leurs structures sous-jacentes. En common law, les trusts impliquent une relation fiduciaire dans laquelle les actifs sont détenus pour les bénéficiaires, alors qu’en droit civil, une fiducie est plus étroitement liée à l’administration des biens dans le cadre d’obligations légales spécifiques. Chaque système a ses avantages et ses inconvénients. Pour combler les lacunes entre les provinces et les systèmes juridiques, un contexte supplémentaire ou des notes explicatives sont souvent nécessaires pour aider le public de droit civil à comprendre la fonction juridique complète de la fiducie. Cela permet d’assurer la clarté entre les systèmes juridiques tout en maintenant l’exactitude de la traduction.
Hypothèque
Un autre exemple est le mot « hypothèque», qui, en droit civil québécois, fait référence à une « mortgage » ou à une « sûreté », et devrait avoir un équivalent exact qui résonne à la fois dans les traditions de droit civil et de common law. À titre de référence pour les traductrice et traducteurs, les lois fédérales pourraient opter pour des termes tels que « security on property ou security interest afin de combler cette lacune et d’assurer une compréhension unifiée dans l’ensemble des compétences territoriales. Voir Prêts transfrontaliers au Canada : ce que vous devez savoir
Conclusion : Pourquoi la terminologie bijuridique est importante
En conclusion, la terminologie bijuridique est essentielle pour traduire avec précision les documents juridiques dans les systèmes de droit civil et de common law du Canada. Les traductrices et traducteurs doivent naviguer dans les complexités des deux systèmes pour assurer la clarté et la cohérence des termes juridiques. La compréhension des nuances de chaque système, l’utilisation d’une terminologie appropriée et l’ajout de notes explicatives si nécessaire permettent d’éviter les interprétations erronées et de garantir que les documents sont clairs et applicables d’une province à l’autre. Cette attention portée au bijuridisme favorise la confiance et prévient les litiges dans les contextes transfrontaliers.
Pour découvrir d'autres conseils pratiques sur la traduction juridique, consultez la page de blog de Traductions Nexus pour nos derniers articles.